vendredi 30 août 2013

Il y a cent ans, le dossier Henriette

Episode III - Voyage et réconciliation.


C'est à la mi-avril que l'on atteint le paroxysme de la crise.

Georges à Henriette, le 18 avril 1915. Extrait

Madame, 
Je suis fou de douleur d'apprendre des choses ou plutôt confirmées par des personnes dignes de foi cette fois. Je vous croyais plus de pudeur et, malgré vos protestations d'amour et de fidélité, je suis obligé, bien malgré moi, croyez-le bien, que tout cela n'est que mensonges et faussetés.

Georges à Henriette, le 23 avil. - Extrait
PS- Dans votre lettre, vous me dites à faire une enquête auprès des voisins qui m'ont été nommés pour me renseigner sur votre conduite. N'ayez aucune crainte à ce sujet, je suis bien trop fier pour cela et ne tiens pas à augmenter mon ridicule. Mais je peux vous les nommer si vous le désirez.

C'est avant la lettre de H. Hucat (27 avril), citée dans l'article précédent, qui est toute en faveur d'Henriette. Celle-ci, heureusement, a d'autres avocats comme, par exemple, un certain Puyvieux, camarade de front de Georges, qui vient d'être rapatrié à Bordeaux pour blessures.

Lettre de Puyvieux à Georges, le 29 avril 1915.
Texte intégral à lire ici

Ta femme avait absolument l'intention d'aller te retrouver [...]ta femme me raconta que ton frère lui faisait tout un tas de méchancetés qu'il lui avait fermé le chai, etc... etc....[...] 
Je vis aussi un télégramme envoyé par ton frère. Je pus, en dehors de toute suspicion, me convaincre que, dans cette occasion, il n'avait pas agi comme un frère eût dû le faire. Car s'il avait dû te dire quelque chose, il devait attendre ton retour, et non pas te torturer de cette façon, sachant que tu ne pouvais te rendre compte. De là à penser qu'il y a calomnie, il n'y a qu'un pas. Quant à moi, je t'avoue que je pense de cette façon.
J'ai lu ta lettre d'un bout à l'autre [lettre adressée à Henriette, que cette dernière lui a fait lire]Je t'avoue que je pense comme toi et que, si vraiment avec une enfant aussi mignonne, elle faisait ce que tu es porté à croire, elle serait indigne même de ton pardon. Mais je pense, avec une profonde conviction, qu'il n'en est point ainsi et que j'ai vu ta femme désespérée  C'est pourquoi, mon cher ami, je te prie de surmonter ta douleur et de demeurer aussi sceptique que possible jusqu'à preuve du contraire. 

Le 30 avril, ébranlé par la conviction de Puyvieux, Georges s'adresse à Henriette en des termes plus amènes, commençant sa lettre par "bien chère Henriette".
Le texte intégral de cette lettre est à lire ici

Extraits ==>
[...]En tous cas, comme je te le dis dans cette lettre, je veux oublier toutes ces histoire et si je t'ai accusée injustement, pardonne-moi.[..] J'ai reçu une lettre de mon ami Puyvieux, qui est toujours au dépôt à Bx qui m'a fait bien plaisir, elle est toute en ta faveur.
...ce qui ne l'empêche pas de conclure avec une petite touche de culpabilisation...pour la bonne forme. ;-)
[...] mais fais en sorte qu'on ne me fasse pas de la peine comme on vient de m'en faire.  Un million de baisers. 
Une dizaine de jours plus tard, Henriette -- a-t-elle bien reçu la dernière missive de Georges ou les choses se sont-elles à nouveau envenimées ? -- est résolue à aller trouver son mari sur le front de la Meuse. Elle fait le voyage jusqu'à Paris, fait une halte chez des amis, puis prend le train pour Verdun. Une lettre des amis en question, les Roussel, en témoigne.

Lettre de M. Roussel à Georges Ibos, le 13 mai 1915.
Le texte intégral de cette lettre est à lire ici

Extraits ==>
Du peu que j'ai pu entendre et constater, votre dame, depuis votre départ au régiment, se trouve en butte contre les méchancetés de votre frère et surtout la femme de ce dernier [...] Aussi, étant arrivée au paroxysme de l'énervement, je dirai presque se sentant presque découragée, elle a voulu essayer une dernière démarche qui, je l'espère, n'aura pas besoin de grande plaidoirie pour arriver à vous prouver quelle n'a pas été son énergie à défendre non seulement vos intérêts mais le bien-être de son enfant. Arrivée hier matin de Bordeaux, elle partait au train de midi pour rejoindre Verdun mais, arrivée à Châlons, impossible d'aller plus loin, son sauf-conduit n'étant pas suffisant pour lui permettre de continuer sa route, elle était de retour chez nous à Paris hier soir à 10 heures.
En effet, pour pouvoir aller jusqu'à Verdun, Henriette a besoin d'une note écrite par son mari, certifiant qu'il l'y a appelée.
Nul ne sait si Henriette à réussi à rejoindre Georges sur le front. Toujours est-il que, vers la fin de l'année 1915, mon grand-père obtient une permission qui lui permet de retrouver sa femme et sa fille à Talence.
Georges, "Nenette" et Henriette vers septembre 1915
lors de la première permission de Georges.

Derniers soubresauts de "l'affaire Henriette".

Si la hache de guerre est enterrée entre Georges et Henriette, elle ne l'est pas entre Henriette et son beau-frère Ernest.. Témoin, cette notification du juge d'instruction reçue par Henriette en août 1916.

Charge invoquée : "vol et violation de domicile".

Mais ce n'est pas tout ! Cinq ans plus tard (1921), plusieurs personnes rédigent des certificats attestant de la bonne conduite d'Henriette pendant la guerre. Il est intéressant de noter que l'un de ces certificats est produit par un certain William Carot, celui-là même dont Ernest invoquait le témoignage à charge contre sa belle-sœur, dans sa lettre de mars 1915.  
Certificat de William Carot en faveur d'Henriette, février 1921. Entre-temps, les Carot ont déménagé à Carbon-Blanc




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